Marine Simonis, descendre toujours plus bas pour aller toujours plus haut
L’apnéiste belge, originaire des Cantons de l’Est, fait partie des rares femmes à pratiquer l’apnée au niveau mondial.
Lorsque ses parents lui ont attribué le prénom de Marine, il y a 29 ans, ils n’imaginaient probablement pas que la destinée de leur protégée prendrait à ce point la direction des fonds… marins. « En plus, je suis verseau. Un signe d’eau. Comme quoi, il n’y a pas de hasard dans la vie. »
L’eau, Marine est, d’une certaine façon, tombée dedans quand elle était petite. « Mon truc, c’était la natation. J’avais un bon petit niveau sur 50 et 100 mètres, nage libre et dos. C’est grâce à ça que j’ai accédé à la discipline. Au début, c’est clair que mon passé de nageuse m’a quelque peu aidée, notamment au niveau technique mais aussi en terme de capacités pulmonaires. »
Marine est une bourlingueuse. Une globe trotteuse. La première fois qu’elle s’essaie à la plongée, c’est en Australie, au hasard d’un job qui l’amène à bosser sur un bateau. « Après, quelques sorties en bouteilles, on m’a proposé de tester l’apnée. La première fois, je suis descendue à 10 mètres. Quand je me suis retournée pour remonter à la surface et que j’ai vu les rayons du soleil qui transperçaient la surface de l’eau, j’ai eu un énorme coup de cœur. Je suis rentrée en Belgique et très vite je suis repartie à Malte pour suivre une formation. A ce moment-là, je n’imaginais pas faire de la compétition, c’était juste un loisir. »
Mais Marine prend goût à cet univers parallèle. A cette sensation d’apesanteur, à cette forme particulière de méditation.
« En apnée, tu perturbes beaucoup moins la faune, tu fais beaucoup moins peur aux poissons qui ont tendance à s’approcher beaucoup plus. C’est une expérience unique. Tu découvres des sensations de ouf, une forme de bien-être que tu n’imaginais même pas avant de pratiquer. C’est une discipline mentale bien plus que physique. Un cheminement intellectuel aussi. Tous les morphotypes peuvent performer en apnée, tout est une question de vaincre ses appréhensions et de lutter contre l’envie de respirer. Il faut parvenir à accepter les sensations nouvelles que ton corps peut ressentir. Mais une fois que tu passes au-delà de ça, ce n’est que du bonheur. »
Aujourd’hui, Marine a déposé son sac, ses combis et ses palmes dans la région de Nice où elle exerce en tant que kiné, notamment au sein de l’académie de tennis de l’entraîneur à succès Patrick Mouratoglou. « Notre spot d’entraînement, c’est la rade de Villefranche-sur-Mer à quelques minutes au large de la promenade des Anglais. Là, on dispose de 200 mètres de fond, sans courant. »
La Mecque de l’apnée en France. « C’est un endroit extraordinaire. En hiver, quand on remonte à la surface, on voit, au loin, les sommets enneigés des Alpes. L’été, il y a des bateaux partout et toute l’agitation de la Côte d’Azur. De là, on voit le littoral rocailleux, la promenade des Anglais, le phare. C’est une atmosphère magique. »
Mais c’est évidemment sous l’eau que Marine apprécie le plus cet univers marin si particulier. Quand la lumière du jour perce courageusement les flots, quand le brouhaha de la vie sur terre fait place à ce silence assourdissant des fonds marins.
« En méditerranée, la lumière est encore perceptible à 60 mètres sous l’eau. Les sons eux, disparaissent même si ce n’est pas totalement silencieux. On perçoit des cliquetis vraiment spécifiques aux fonds marins, et dont on ne sait pas vraiment identifier l’origine. Ce sont des moments hors du temps, magiques. D’autant plus quand tu aperçois un dauphin ou une raie qui semble voler au-dessus de toi. L’une des particularités de la plongée en Méditerranée, c’est le passage de la thermoclime, cette sorte de frontière thermique entre les eaux chaudes de surface et les eaux plus profondes. C’est toujours un moment particulier de ressentir ce froid qui pique le visage et contracte le corps. Parfois, entre la surface et une profondeur d’une vingtaine de mètres, on passe d’une eau à 29 degrés à une eau à 15. C’est là que le relâchement musculaire est primordial. »
Aujourd’hui, Marine a fait de sa passion un sport de compétition. Son truc à elle, c’est le poids constant (avec une monopalme ou sans rien), la discipline la plus pure de l’apnée qui consiste à descendre et à remonter à la surface à la force des jambes et des bras, sans recourir à aucun artifice. Elle a récemment abaissé le record de Belgique à -56 mètres (il était jusque-là de 33 mètres) et fait désormais partie de l’élite mondiale de la discipline. Descendre toujours plus bas pour aller toujours plus haut.
Marine Simonis
- 29 ans, originaire des cantons de l’Est (Moresnet – Plombières), vit à Nice
- Kinésithérapeute indépendante
- Recordwoman de Belgique de CNF, apnée en poids constant sans palme (56 mètres)
Apnée statique : entre 6 et 7 minutes