Mon Spo(r)t : Marten Van Riel, une vie entre Loenhout et Gérone
Le cœur à Loenhout, petite commune de Wuustwezel à 30 kilomètres d’Anvers, les jambes à Gérone, bucolique ville de Catalogne. Voilà comment on pourrait résumer la vie de Marten van Riel, l’un des meilleurs triathlètes du monde. Mais n’y voyez pas une dichotomie, plutôt une complémentarité entre deux lieux qu’à priori tout oppose mais qui dans la vie de Marten sont devenus indissociables.
Loenhout, c’est la base. Le port d’attache. Le point de repère entre deux voyages au bout du monde. « C’est là que j’ai appris à nager, à courir et à rouler à vélo. Je ne sais si j’aurais autant apprécié pratiquer ces disciplines si j’avais grandi à Anvers, une ville qui s’est beaucoup développée ces
dernières années et dans laquelle je me reconnais moins. » Mais il faut se rendre à l’évidence, la région, aussi agréable soit-elle, n’est pas propice à l’entraînement d’un triathlète de haut niveau. Un climat peu docile, un relief quasiment inexistant, des routes parfois en mauvais état.
« J’ai passé cinq années de ma vie entre les Canaries et Majorque notamment, à enchaîner les stages avec parfois aussi des séjours dans les Pyrénées. Et puis je suis allé une fois à Gérone où j’ai trouvé absolument tout ce que je cherchais. »
Une vie de nomade. Dix mois sur douze à traîner d’imposantes valises d’une chambre d’hôtel à un AirB&B, le vélo parqué dans un coin d’espaces souvent trop exigus.
« Quand le corona a immobilisé la terre entière, il a fallu que je me pose. J’ai cherché un endroit où la météo était favorable et les conditions
d’entraînement en phase avec mes objectifs. Gérone s’est imposée parce que c’est une ville accueillante connue comme le paradis du cyclisme. Pour moi, c’est l’endroit idéal pour un séjour prolongé parce que la vie sociale y est aussi particulièrement chouette. À la maison, à Loenhout, c’était plus difficile : tous mes copains, qui bossent en journée, se réunissent plutôt le week-end pour boire une bière.
C’est difficilement envisageable pour moi. Ici, à Gérone, ils se réunissent plutôt en journée. Et on remplace les bières par des café…s. Généralement sur une terrasse ensoleillée. »
Vivre loin des tentations, dans un environnement professionnel qui respire la rigueur du sport de haut niveau. Arpenter tous les jours des routes sur lesquelles d’autres forçats de l’effort en solitaire ont transpiré avant lui. C’est ça qu’il fallait au meilleur triathlète belge pour continuer à progresser.
« Dans les années 90, il y a eu une énorme vague de cyclistes qui se sont installés ici. Lance Armstrong, Tyler Hamilton, Georghe Hincapie ou encore David Millar… En 2012, c’est Jan Frodeno (l’un des plus grands triathlètes de tous les temps, NDLR) qui est venu vivre ici. Beaucoup de triathlètes ont grâce à lui redécouvert les avantages de cette région. J’en fais partie. »
Mais le point de chute de Marten, son port d’attache, ses racines profondes, c’est ce petit village de Loenhout où tout le monde se salue par le prénom et qui constitue une grande part de son identité.
Une terre de vélo aussi connue pour con célèbre cyclo-cross de l’Azencross où les plus jeunes ont forgé leur caractère de dur au mal. Des champs et des bois pour s’entraîner en pleine verdure, courir, pédaler à perdre haleine entre sentiers et chemins forestiers. La nature, pour terrain de jeu.
« Loenhout, c’est ce que j’appelle ma maison. Un endroit paisible, idéal pour construire un projet de vie et une famille. Je suis convaincu que Gérone est une phase passagère de ma vie parce que mon
cœur sera toujours à Loenhout. »
Ici, les souvenirs sont partout comme ce petit pont (où le shooting pour cet article a en partie eu lieu, NDLR) qui servait de point de repère pour les premiers entraînements de course à pied de Marten. « Nous devions faire des aller-retours avec ce pont comme limite à atteindre avant de faire demi-tour.
C’est aussi ici, sur ces chemins que je connais par cœur, que je servais de lièvre à mon papa quand il faisait ses entraînements d’intervalle, moi sur mon vélo, lui à pied. J’ai toujours aimé arpenter la région, les petites routes, les chemins, les sentiers. Je n’aurais pas aimé naître ni vivre au centre d’Anvers. »
Loenhout, un village quelque peu isolé que Marten quitte tous les jours, au petit matin, juché sur son vélo d’ado pour se rendre à l’école, 11 kilomètres plus loin. Qu’il pleuve, qu’il vente ou qu’il neige. Matin et soir. « Mes parents ne m’ont quasiment jamais emmené à l’école en voiture. C’était le bus ou le vélo et vu que je n’aimais pas le bus… ». Un rituel quotidien qui forge le caractère de Marten, travaille sa résistance aux conditions difficiles et pose les bases de son endurance. « Comme les enfants au Kenya qui doivent marcher plusieurs kilomètres chaque jour pour se rendre à l’école, moi, je faisais ça à vélo. Je me surnomme d’ailleurs parfois le Kenyan du vélo. »
Mais c’est lors des vacances familiales en montagne que le jeune Marten, alors âgé de 15
ans, se découvre une passion pour l’effort de longue haleine. L’Alpe d’Huez, le Galibier, le Ventoux, l’Aubisque. Des noms mythiques. Des cols emblématiques. « Pendant les vacances, je grimpais tous ces cols, poussé par mon père. Je les ai tous faits et je me suis découvert un goût pour les efforts de longue distance. Pourtant, mon sport en Belgique, c’était plutôt la natation. Mais au fond de moi, je rêvais de devenir cycliste professionnel. C’est finalement par le triathlon que j’y suis parvenu. »
Une vie de nomade, un camp de base baigné de soleil à Gérone pour continuer à performer et un phare dans la campagne anversoise pour rentrer au port se ressourcer sur ses terres natales, c’est ça les spots de Marten Van Riel.
Marten Van Riel
- 29 ans
- 4e du triathlon olympique de Tokyo en 2021 (distance olympique – courte distance)
- 5e du relais mixte olympique à Tokyo en 2021 (distance olympique – courte distance)
- Deux victoires sur Ironman 70.3 (Dubaï 2022 – moyenne distance)
- Deux podiums en coupe du monde (Edmonton et Leeds 2021)
- 3e des championnats d’Europe (distance olympique) en 2018
- 6e du triathlon olympique de Rio en 2016